L'INFO n° 635
Lundi 1er septembre 2014 : Cérémonie du 70ème anniversaire du Train de Loos
Gare de Tourcoing, le vendredi 1er septembre 1944, alors que les troupes britanniques sont à l’approche, ayant libéré Arras et Douai, les nazis déportent en Allemagne, 871 personnes, dont une majorité de résistants, arrêtés souvent depuis plusieurs semaines.
Trente-trois membres du réseau Sylvestre-Farmer (capitaine Michel), autant de l’Organisation Civile et Militaire (OCM), des membres des réseaux Ajax, Century, Pat O’Leary, vingt-huit membres du mouvement Voix du Nord, trois officiers du BCRA (Bureau central de renseignements et d'action, les services secrets de la France libre), des résistants FTP, ainsi que cinquante-trois otages, de nombreux réfractaires au STO et quatre Juifs.
Sur ces 871 résistants et otages, seulement 275 revinrent de déportation en 1945.
Allocution de Madame Anne VOITURIEZ, Maire de Loos, prononcée le 1er septembre 2014, à l’occasion de la commémoration du 70ème anniversaire du Train de Loos.
« Monsieur le Président de l’Amicale du Train de Loos, Monsieur le Président de l’Association du Centre de Mémoire de l’Abbaye Prison de Loos, Mesdames et Messieurs les membres d’associations de déportés, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil municipal. Chers concitoyens :
C'est avec beaucoup d'émotion que je prends la parole aujourd'hui pour commémorer le tragique épisode du train de Loos.
Il y a 70 ans le vendredi 1er septembre 1944, à la veille de la libération de Lille, 871 détenus sont regroupés à la prison de Loos et transportés en gare de Tourcoing pour un ultime convoi de déportés. 275 seulement revinrent.
C'est leur mémoire à tous que nous célébrons aujourd'hui et je tiens à cette occasion à adresser un salut très chaleureux aux anciens combattants et prisonniers de guerre, aux associations patriotiques, porte-drapeaux et officiers de réserve ainsi qu’aux familles de déportés ici présents.
Rappelons le contexte historique :
A la suite du débarquement en Normandie en juin 1944, Paris est libéré le 25 août. Le 1er septembre, les Britanniques sont à Douai. Craignant un soulèvement général de la population, l'armée allemande multiplie les arrestations d'otages et de résistants.
Elle précipite l’évacuation des prisons de la zone et regroupe les détenus à la prison de Loos : En juillet et août 1944, plus de 1500 détenus sont ainsi entassés à 15 dans des cellules de 9m² à la prison de Loos.
Le 26 août, deux hommes avertis : le Pasteur Marcel PASCHE et le Consul suisse, Fred HUBER, rencontrent le chef de la prison, SIEBEBER. Ils parviennent à faire libérer certains détenus dont toutes les femmes : 700 hommes et femmes sont ainsi libérés par groupes de 20 toutes les demi-heures, et doivent se disperser au plus vite...
Les 871 détenus restants sont amenés par camion à la gare de Tourcoing entre 5 H 30 et 17 H 30, et entassés à 80 ou 90 par wagon dans un train de marchandises. Le dernier camion avec 23 détenus arrive à la gare alors que le train est parti : ceux-là ont eu de la chance, ils ont été sauvés par une crevaison sur le parcours et libérés sur place...
Vers 17h30, le sinistre convoi, encadré par des Waffen SS, démarre en direction de la Belgique. 13 déportés réussissent à s'évader du train entre Tourcoing et Cologne. Pour les autres c’est 3 jours de voyage dans des conditions inhumaines ; 20 à 30 déportés décéderont durant le transport.
Le 3 septembre, le train arrive à Cologne : 26 déportés sont transférés dès leur arrivée vers le camp de Buchenwald, 250 sont envoyés à Mulheim pour dégager des voies ferrées bombardées. Quant aux autres c'est en grande partie vers Sachsenhausen qu'ils seront déplacés en octobre 44.
Au printemps 45, devant l'avance des alliés, les camps sont évacués vers la Baltique. Au cours de ces interminables marches de la mort des centaines de déportés du train de Loos trouvent la mort.
Le terrible bilan fait état de 560 décès et de 275 survivants.
Nous rendons hommage aujourd’hui à tous ces déportés dont la plupart étaient originaires de notre région, victimes d'enchaînements successifs du destin.
Nous rendons hommage au courage et à la générosité de ces hommes qui étaient majoritairement emprisonnés pour des faits liés à la Résistance et dont 56% avaient moins de 30 ans.
Leurs noms gravés sur ces plaques de bronze apposées à ce mur en 2006 ne doivent pas sortir de nos mémoires.
Je salue, aujourd'hui, l’initiative respectueuse de l’Amicale du train de Loos.
L'oeuvre de mémoire est essentielle aujourd'hui, 70 ans après les faits, dans notre Europe encore marquée des stigmates du passé. Les récents évènements d’Ukraine nous rappellent les lignes de fracture du continent européen, et la vigilance de chaque jour qui doit être la nôtre.
Toutefois je ne veux pas terminer ce discours sur une note pessimiste.
Il faut certes inlassablement rappeler la tragédie qui s’est jouée ici à quelques heures de la débâcle allemande.
Rappeler les horreurs commises par le sinistre Reich nazi nous permet de tirer les leçons du passé mais ne doit pas avoir pour objectif de raviver les plaies anciennes.
Combattre la haine qui divise les hommes, qui divise les peuples et travailler à une Europe toujours plus unie, voilà notre horizon, à nous citoyens de Loos, à nous citoyens d’Europe ! »